Suite à l’entrevue diffusée aux Années Lumière dimanche le 21 décembre dernier, Laurent Bilodeau de Montréal m’envoie le scan de cet article intitulé “Le ras-le-bol de Laborit” en rappelant ce que l’on a peu abordé durant l’entrevue, c’est-à-dire la critique sociale radicale de Laborit. Évidemment, en 25 minutes d’entrevue, on ne peut couvrir tous les aspects d’une vie aussi remplie que celle de Laborit, mais je remercie M. Bilodeau d’avoir envoyé cet article qui constitue un excellent complément à l’entrevue pour montrer les conséquence de cette pensée en “niveaux d’organisation” où le biologique est le social sont intimement liés.
L’entretien rapporté dans cet article par Marc Thibodeau a eu lieu en juin 1994, c’est-à-dire environ un an avant le décès de Laborit qui y dresse un bilan sombre et lucide de ce qu’a été jusqu’ici l’histoire de l’espèce humaine : la recherche de la dominance couverte par des alibis langagiers conscients occultant des motivations inconscientes qui mènent tout droit au sous-titre de cet article (“Crimes, meurtres, guerres…”).
Extraits choisis :
“Les animaux, même le lion, fuient. S’ils ne peuvent le faire, ils se retournent vers l’agresseur […] et ils essaient de le faire disparaître. Il y a donc fuite ou lutte. Et si ni l’une, ni l’autre n’est possible, la seule chose qui vous reste à faire, c’est d’entrer en inhibition de l’action. […] Imagninons que vous êtes un petit surmulot dans un champ […] Si […] vous arrêtez de bouger, le faucon ne passera pas sa journée là, vous pouvez vous remettre à trottiner et retourner dans votre terrier pour vous protéger. Vous avez sauvé votre peau. Entrer en inhibition de l’action, c’est donc une autre façon de se tirer d’affaire.
Malheureusement, dans la vie, il n’y a pas que les faucons. Il y a aussi les vrais cons. Si la gueule de votre chef de chantier ne vous revient pas, vous ne pouvez pas fuir parce que vous seriez alors en chômage. Vous ne pouvez pas non plus lui casser la figure parce qu’on vous enverrait les flics. Alors, vous êtes en inhibition de l’action et ça dure des semaines, des mois… et la dépression se développe.”
“Vous utilisez donc un instrument que vous ignorez [le cerveau] avec un discours logique (parce qu’en plus le malheur chez l’Homme c’est qu’il parle), qui va expliquer tous vos crimes, vos meurtres, vos guerres, vos génocides, vos tortures, etc. Vous avez toujours une bonne raison logique pour expliquer pourquoi ça se passe. […]
Et ce, parce qu’on ne leur a pas expliqué comme ça se passe au niveau du cerveau. On ne leur a pas expliqué par exemple que s’ils ont tel jugement de valeur, c’est parce qu’ils y ont été exposés quand ils étaient gosses. S’ils le savaient, et s’ils savaient que l’autre le sait aussi, ils seraient peut-être moins affirmatifs, plus relatifs. Ils se méfieraient de ce qu’ils disent comme de ce que dit l’autre d’ailleurs… et il serait alors possible que les rapports sociaux soient transformés.”
Mon intérêt se loge dans l’émotion. J’étais jeune, sans talent particulier pour la science. Mais son nom (Laborit) résonnait dans mes oreilles parce que Laborit-te était celui qui était à suivre. Il secouait les “oeillères”…
Et voilà t’y pas que les Années Lumières me remuent le coeur. Content aussi d’avoir entendu le témoignage de son fils. OOOOhhhhh la belle voix concorde avec le Bon Sens ! Un Moment Bpnheur. Merci.