C’est vendredi et comme promis je ressors un autre document de mes “archives personnelles”. Plus précisément un entretien de Hélène Barrère avec Laborit dans le numéro 2 de la revue Itinérances, parue en novembre 1986. Dans le cadre d’un dossier intitulé “Vaincre la peur”, Laborit s’y exprime sur plusieurs sujets tel qu’en témoignent les nombreuses catégories associées à cet article. Pour lire les sept pages de l’entretien, il s’agit donc de cliquer sur chaque lien correspondant ci-bas (une fois rendu sur l’une des images scannées, vous pouvez aussi utiliser le bouton “Précédent” en haut à gauche de l’image pour passer à la page suivante (même si c’est contre-intuitif, j’en conviens, mais un bogue m’oblige ici à procéder comme ça !)).
Je donne pour chacune des pages un bref aperçu ou extrait de ce qu’on y trouve.
Dans la première page, Laborit établit un lien entre l’agressivité à grande échelle chez les humains et l’idéologie marchande dominante : “on allume la radio, la TV et on n’entend que “l’entreprise”… moi, je veux bien… faire des marchandises… mais on a autre chose à faire sur cette planète…”
“L’agressivité est un apprentissage social pour respecter les valeurs qui maintiennent une structure hiérarchique.”
Dans la deuxième page, Laborit distingue entre autres la peur (qui produit la fuite ou la lutte) et l’anxiété qu’il appelle l’inhibition de l’action (terme plus proche des mécanismes qui la sous-tendent). J’ai d’ailleurs résumé ceci dans une série de trois schémas au niveau débutant, intermédiaire et avancé dans Le cerveau à tous les niveaux.
Dans la troisième page, Laborit s’explique sur son rapport aux tranquillisants, comme la chlorpromazine, qu’il a contribué à mettre au point. D’une part il constate que la société marchande pousse les gens à en consommer en grande quantité pour calmer leur mal de vivre : “S’ils n’en prenaient pas, vous n’auriez pas suffisamment de prisons pour vos délinquants, de cimetières pour vos suicidés, et de maisons pour vos fous.” Et puis, un doute… : “Et puis je me suis dit, les années passant, que s’il n’y avait pas eu les psychotropes, il y aurait peut-être eu des révolutions et que quelque chose aurait pu changer.”
Dans la quatrième page, on trouve entre autres la distinction entre “information structure” et “information circulante”, deux concepts centraux chez Laborit (qui évoquent l’influence que la (première) cybernétique a eu sur lui).
Dans la cinquième page, Laorit s’exprime sur la mort : “ce qui va mourir, c’est les autres que j’ai engrammé dans mon système nerveux, dans un point unique de l’espace-temps, parce que je suis unique, comme vous, vous êtes unique aussi.”
Dans la sixième page, Laborit n’est pas tendre avec le langage. Beaucoup plus avec la connaissance, cependant.
“La mémoire n’est pas un mot, l’imaginaire n’est pas un mot, l’affectivité, les pulsions, l’amour, le bonheur ne sont pas des mots, mais des mécanismes ! Vous continuez à me parler avec des mots! Tant que vous n’aurez pas fait l’effort de comprendre ces mécanismes, on ne peut pas s’entendre ! […] Pour moi, ce qui est important, c’est connaître, parce que quand on ne connaît pas, on fait bla bla bla…”
Et dans la septième et dernière page, Laorit fait allusion à son laboratoire et conclut sur le travail qui pour lui doit être considéré comme un plaisir.
On voudrait tous pouvoir en dire autant !
MISE À JOUR 5 JUIN 2015 : on vient de m’envoyer le lien de cette entrevue sur le Net